A quoi servons-nous? A cela.
Depuis juillet 2016, nous nous battons sur Sens au quotidien auprès des demandeurs d'asile.
Il a fallu un certain temps pour que chacun ici prenne conscience de ce que représentait Dublin.
Avec le transfert des DA sénonais sur Auxerre, nous avons fait connaissance des autres demandeurs d'asile dont K.
Pendant tout l'hiver, nous en avons vu tant s'enfuir sans que cela mobilise suffisamment autour de nous. Notre première mobilisation sur Dublin a été devant l'Yonne Républicaine de Sens.
Certains d'entre nous ont pu continuer à aller à Auxerre.
Des amis qui ont mis en route des cours de français
Et nous qui allons régulièrement à Coallia,
Bravant dès le premier jour les interdits de Coallia.
Nous avons passé cet horrible hiver.
Certains demandeurs s'enfermant comme K. dans le mutisme, à partir du moment où les premières notifications ont eu lieu et que les premiers demandeurs prenaient "la fuite" (comme aime à les déclarer l'Etat français) rejoignant les pavés de France et d'Europe. Les soirées tristes et chaque lundi l'angoisse de nouvelles notifications dans la semaine qui s'ouvrait.
Les demandeurs d'asile eux-mêmes se sont battus : ainsi, il existe un superbe texte des demandeurs d'asile soudanais rédigé au cœur de l'hiver. Les DA ont aussi réagi collectivement à des moments de grande injustice.
Nous les avons accompagnés dans les moments de désespoir, nous avons tout fait pour mobiliser autour de nous, et nous avons commencé à les accompagner dans leurs démarches.
Puis sont venus les deux mois sans expulsion ("grâce" aux élections) et l'explosion de joie quand beaucoup de ceux qui restaient sont alors devenus "normaux".
C'est là que K.est sorti de journées de sommeil et de silence et s'est coupé les cheveux dans un geste symbolique comme pour une nouvelle vie.
Puis sont venus les moments de nouvelles angoisses. Celles que l'on connaît avec les refus de l'Ofpra.
Mais K. faisait partie de ceux dont le dossier était si noir que l'Ofpra même dès l'audition a indiqué
qu'il aurait l'asile. Et pourtant sans ces deux mois inespérés, il aurait fait partie de ceux qui auraient été notifiés Italie
et serait comme nos amis aujourd'hui au Prahda devant la terrible alternative de l'avion ou de la rue.
Si nous avons pu être ainsi auprès d'eux, c'est aussi grâce aux amis du collectif, aux électrons libres et à des militants de Sens (et des environs),
qui ont toujours été attentifs à nous, à notre présence, à la fatigue que cela
représentait. A eux qui sont encore présents à chaque mobilisation pour Appoigny.
C'est à cela que nous servons.
Notre combat contre Dublin, contre les refus d'asile
Notre accompagnement indéfectible au quotidien face à leur désespoir et dans les moments de joie.
Notre aide dans les démarches.
Nous nous réjouissons pour K. bien que nous sachions les souffrances qu'il a dû endurer
pour être ainsi reconnu.
Mais nous restons plus que jamais et complètement mobilisés contre le tri dans les CAO, et l'angoisse des transferts vers le Prahda.
Contre le dispositif d'expulsion rapide du Prahda
Face aux multiples refus de l'Ofpra.
Dans la préparation du passage devant la CNDA.
Le combat pour l'asile reste le combat essentiel. Et c'est un combat.
Ce soir, c'était jour de fête, d'autant plus émouvant que beaucoup de ceux qui riaient avec lui ont eux des refus de l'Ofpra. C'est un nouveau témoignage des qualités humaines de ces demandeurs.
Ainsi S.et Abd. qui comme deux autres Afghans n'ont toujours pas reçu l'annonce de leur passage en procédure normale, qui vivent depuis fin juillet 2016, dans ces multiples attentes, étaient partie prenante de ce bonheur partagé.
17 octobre, date symbolique.
Dominique
Un témoignage