Plus de 150 demandeurs d'asile ont été amenés d'abord de Paris (La Chapelle, Jaurès, Stalingrad...) puis de Calais dans l'Yonne. Une grande majorité dépend de Dublin. Ils ont pris tous les risques et maintenant ils risquent le retour dans un pays où ils ont été enregistrés contre leur gré et où les conditions d'accueil ne sont pas acceptables. Lire dans la rubrique Pages : notre pétition, la lettre des demandeurs d'asile soudanais d'Auxerre ... . Consulter les catégories : Paroles de demandeurs d'asile, Pays de non asile, Nous les soutenons, Nous informons, Chronique en 89, Prahda, Ofpra.
Signer la pétition pour la régularisation : https://secure.avaaz.org/fr/community_petitions/emmanuel_macron_et_le_gouvernement_francais_france_regularisation_de_tous_les_sanspapiers/?txqxfqb&fbclid=IwAR2vLV1piiM2wCy8EP05vhzCNFk5iLL_tvPjntEgXI5yFb9Qk4kBBKrgprY
Des mini-cuisines et l'Yonne avec les responsables du Prahda se réjouit: les conditions se sont améliorées!
Mais le Prahda reste ce qu'il est.
Un lieu d'expulsion accélérée, un lieu aux conditions indignes où
les droits sont bafoués.
A-t-on déplacé ce bâtiment isolé, en bord d'autoroute, invisible? Loin de tout.
A-t-on arrêté le processus d'expulsion rapide qui a mis dans les rues d'Europe déjà plusieurs dizaines de demandeurs d'asile Dublin? Seul l'engagement de militants pour les droits des demandeurs a pu en protéger quelques-uns en faisant respecter leurs droits.
Y a-t-il un accompagnement pour les demandeurs en procédure normale qui doivent se préparer face aux procédures iniques de l'Ofpra et de la CND.
Les notifications de la préfecture ont-elles cessé au Prahda?
La direction s'est-elle engagée pour ne pas accepter dans des conditions impropres des familles de demandeurs d'asile entières, une femme enceinte qui va accoucher dans ce formule 1 dans les jours qui viennent (un scandale!), un bébé de même pas trois mois, une famille logée dans une seule chambre.
Le Prahda a-t-il un personnel suffisant pour les 82 personnes qu'il a accepté de recevoir?
Le Prahda a-t-il mis en place des conditions permettant aux demandeurs d'asile d'être soignés, aux enfants d'aller à l'école, aux demandeurs d'asile de pouvoir se déplacer pour leurs démarches. Seul l'engagement issu de la mobilisation de cet été permet en fait en ce moment de répondre aux besoins les plus criants.
Dans l'article, la direction ose dire qu'ils sont là pour peu de temps, ce qui revient à cautionner le principe même des expulsions accélérées et qui fait l'impasse sur le fait que beaucoup de demandeurs sont en procédure normale et même que certains ont des papiers. Elle dit aussi clairement qu'il n'est pas nécessaire d'avoir de meilleures conditions pour les Dublin qui ont "vocation" à être expulsés.
Le blog milite contre les Prahda, depuis l'ouverture à Appoigny. La photo de ce Prahda montre bien qu'il y a de belles mobilisations ailleurs. Depuis juillet, nous avons tous ensemble milité contre ce Prahda. Et nous pouvons encore amplifier ce mouvement.
Il milite aussi pour que l'on se mobilise pour tous les demandeurs d'asile de l'Yonne , comme à Appoigny ou Villeblevin, qu'ils soient à Jaulges, à Auxerre, à Saint-Florentin, ou à Joigny.
Un mouvement pour l'asile, contre les expulsions dans l'Yonne : pas d'expulsion pour les Dublin, pas d'OQTF, pas de retours forcés dans l'Yonne!
Lundi 20 novembre, un homme de 34 ans, d’origine algérienne, sans papier, était embarqué de force dans un avion d’Air France qui devait passer par Paris pour le renvoyer en Algérie.
Dans cet avion 3 policiers danois se mettent sur lui et l’étouffent jusqu’à ce qu’il soit inconscient. Évacué en ambulance de l’aéroport, il mourra 2 jours plus tard, mercredi 22 novembre, à l’hôpital.
Ce n’est pas la première fois que l’on assiste à des violences policières et à un assassinat dans les déportations. Il ne s'agit pas d'un triste dérapage. Au Danemark, en France, les expulsions sont (presque) toujours violentes : bâillonnées, ligotées, frappées, étouffées voire même droguées, les personnes déportées ne subissent pas seulement la police du pays dans lequel elles sont expulsées, mais aussi celle de l’Europe, de Frontex à la police aux frontières.
L’enquête est en cours, et la police refuse de délivrer l’identité de la personne. Il faudra attendre la fin de l’instruction, qui prendra plusieurs mois. Non seulement, la police tue, cherche à faire taire les morts et à en faire des anonymes.
Face à la violence de ces actes, les militants danois ont décidé d’un rassemblement mardi en fin d’après midi pour engager la responsabilité de leur gouvernement, et notamment de la Ministre de « l’Intégration » Inger Støjberg, connue pour ses prises de position racistes anti-immigration, qui se félicite à chaque déportation, et qui donne les moyens légaux à sa police pour être plus violente.
Nous devons également, en France, dénoncer la multiplication des déportations orchestrées par le Ministère de l’Intérieur, les violences policières que subissent, dans la rue et les centres d’hébergement comme dans les Centres de Rétention et les aéroports, exilé.e.s avec ou sans-papiers, les politiques néocoloniales et de collaboration entre le gouvernement français et les pays d’origines des exilé.e.s (Mali, Soudan, Afghanistan, Libye). Et la collaboration d'Air France dans ces déportations.
IL FAUT QUE CELA CESSE. NOUS NE POUVONS ACCEPTER QU’UN.E DE PLUS SOIT TUE.E.
CONTRE LES DEPORTATIONS ET LES VIOLENCES POLICIERES, CONTRE CETTE POLITIQUE RACISTE ET NEOCOLONIALE, NOUS APPELONS A UNE MARCHE MARDI:
- Rendez-vous 18H métro Barbès,
- Départ 18H30,
- Arrivée Rue de l'Evangile, prises de parole
(manifestation déposée, mises à jour à suivre d'ici mardi)
Avenue de la Porte des poissonniers sous le périphérique samedi le 25 novembre à 5 h du matin Soudanais, Afghan, Erythéen, Somalien... gazés par la police.
Facebook T. Perkins
16 novembre, sous le périphérique, Boulevard des Poissonniers
Evacuation, nettoyage, panique pour les personnes dans la rue sous le périphérique Porte des Poissonniers ce matin dès 6 h.
Beaucoup de police, France-Terre d'asile, Adoma. Aucune idée de ce qui était prévu, aucune information sur la suite.
Des bus qui partaient quelque part.
Des personnes qui couraient....
Toutes les personnes à la Porte des Poissonniers sont de retour de leur transfert Dublin vers l'Allemagne et l'Italie.
3 novembre, sous le périphérique, Boulevard des Poissonniers
Voir la vidéo sur le facebook de T. Perkins.
Ces personnes sont toutes des victimes de Dublin III. Les Soudanais ont été déportés en Italie, les Afghans en Allemagne. Elles sont maintenant de retour en France, car ces pays ne les laissent pas déposer une demande d'asile.
Après 10 mois en France, 10 mois d'attente, leur droit de demander l'asile a été bafoué et elles ont été déportées.
Elles n'ont pas de solution, elles n'existent plus pour l'administration française, qui en déportant, refuse sa responsabilité, se lave les mains, nie les droits fondamentaux.
Il a plu ce soir, il fait froid. Les personnes sont serrées en dessous du périphérique.
Dans l'Yonne, déjà de nombreux demandeurs d'asile étaient menacés d'expulsion. A ceux-là vont s'ajouter maintenant, ceux arrivés depuis juin 2016 et qui, si ils n'ont pas dû s'enfuir pour fuir Dublin, sont devant l'Ofpra et la CNDA.
Contre les expulsions
Contre Dublin
Contre les décisions de l'Ofpra et la CNDA
d'expulser
Pour l'asile
Rappelons aussi que les morts en cours d'expulsion sont une réalité. Nous avons en mémoire Semira Adamu, jeune Nigériane morte en Belgique en 1998, symbole de toutes ces morts. Rappelons aussi la mort par étouffement de Abdelhak Goradia, lui aussi Algérien mort pas asphyxie alors qu'une escorte policière le conduisait à Roissy. en 2014.
Une information adressée par une amie.
Un ressortissant algérien, établi clandestinement au Danemark, a trouvé la mort hier mercredi dans un hôpital danois, deux jours après que les autorités de ce pays aient tenté de l’expulser vers l’Algérie.
Selon des témoins, des éléments de la police danoise auraient tenté d’embarquer de force l’homme âgé de 34 ans à bord d’un avion en partance pour l’Algérie, dans un aéroport de la capitale danoise Copenhague. « J’ai remarqué trois agents de la police danoise qui tentaient d’embarquer le citoyen algérien de force à bord de l’avion (…) deux d’entre eux se sont jetés sur lui tandis qu’un troisième tentait de l’immobiliser sur son siège » rapporte un témoin de la scène, qui ajoute que la lutte entre le ressortissant algérien et les trois agents de police a duré environs une demi-heure.
L’homme aurait ensuite perdu connaissance et une équipe de secours est intervenue pour son transfert à l’hôpital, a-t-on également rapporté. Les autorité danoise ont, de leur côté, annoncé l’ouverture d’une enquête.
Nous savons que c'est là le résultat d'un travail inlassable, obstiné ainsi que du courage des demandeurs d'asile qui se sont battus et qui aujourd'hui ont témoigné. Ce que cet article nous enseigne : ne jamais baisser les bras, ne jamais accepter. Il est toujours possible de briser le silence. Merci.
À 200 km de Paris, une centaine de migrants vivent dans des conditions alarmantes. Notre enquête lève le voile sur la situation sanitaire et le fonctionnement opaque du centre de Jaulges (Yonne). Le Défenseur des droits a été saisi en octobre.
Publié le
La situation géographique et la configuration des lieux donnent au centre d'accueil et d'orientation (CAO) de Jaulges un aspect de prison à ciel ouvert. La Croix-Rouge entretient l’isolement extrême des résidents en surveillant tout contact avec l'extérieur, en limitant l’accès à l’information et en ouvrant leur correspondance.
Pendant une visite à des résidents, la Croix-Rouge a tenté de nous empêcher de prendre des photos, de restreindre nos déplacements et de nous intimider.
Plusieurs demandeurs d’asiles ont été contaminés par la tuberculose.
Le Défenseur des droits déclare avoir été saisi sur les conditions de vie au CAO de Jaulges.
Pour atteindre le centre d’accueil et d’orientation (CAO) de Jaulges, dans l'Yonne, il faut quitter la petite ville de Saint-Florentin et marcher environ deux heures. Au détour d'une route départementale, un transformateur électrique sur lequel le slogan «DEHORS» recouvre l'inscription «REFUGEES WELCOME» indique qu'on est presque arrivé. À gauche, au bout du petit chemin goudronné se dresse l'imposant portail de l'ancien camp militaire transformé en centre pour demandeurs d'asile, géré par la Croix-Rouge, perdu en pleine forêt. On s'y est rendu à la mi-novembre après avoir recueilli les témoignages alarmants de deux réfugiés qui y ont passé huit mois.
À leur arrivée en France en 2016, Diarassouba*, un Ivoirien de 27 ans, et Bakari*, un Guinéen de 21 ans, sont d’abord passés par le centre humanitaire situé porte de la Chapelle, à Paris. «Un matin, on nous a dit qu'on allait en province à 1 h 30 [de Paris] sans nous préciser exactement où. Là-bas, ils allaient étudier notre dossier», se souvient Diarassouba. Mais arrivés sur place, les passagers du bus ne peuvent plus revenir en arrière. «Le bus était plein quand on est arrivés à Jaulges», se rappelle à son tour Bakari. «En voyant l'endroit, certains ont refusé de descendre. La police était là et c'est elle qui nous a fait descendre.»
Diarassouba et Bakari sont restés huit mois à Jaulges, ils sont aujourd'hui en fuite. Ce n'est qu'une fois arrivés dans l'Yonne que les Diarassouba et Bakari tombent sous le coup du règlement européen Dublin III qui établit que le pays responsable de la demande d'asile d'un migrant est celui qui l'a contrôlé en premier. Autrement dit, ils vont être expulsés vers l'Espagne, le premier pays de l'Union européenne qui a prélevé leurs empreintes. «À l'annexe de la préfecture, boulevard Ney [dans le 18e arrondissement de Paris], on nous a tous dit qu'on était en procédure de demande d'asile normale. Mais arrivés là-bas, la préfecture nous a dit qu'on était dublinés», poursuit Bakari.
Les demandeurs d'asile se sentent alors trahis par les autorités. Ils voient le camp de Jaulges comme un piège dans lequel on les a jetés.
«L'État est chez lui, et fait ce qu'il veut»
La zone de 42 hectares qui abritait la 15e base du soutien matériel de l'armée de terre (BSMAT) faisait l'objet d'un plan local de revitalisation depuis le départ des militaires en 2014. Au mois d'octobre 2016, le préfet convoque le maire de Jaulges et ceux des communes voisines et leur annonce la nouvelle. «Ce que je vais vous dire ne va pas vous plaire. L’État a décidé de faire dans l’ancien camp militaire de Jaulges, un CAO, centre d’accueil et d’orientation pour migrants. L’Etat est chez lui et fait ce qu’il veut», retranscrit dans ses vœux le maire du village de Chéu, l'une des communes limitrophes.
Les premiers bus de demandeurs d'asile sont arrivés à Jaulges, un mois après cette réunion expéditive en novembre 2016. «Nous sommes là, dans l'ignorance. Nous n'avons pas reçu d'informations. Nous demandons pour les recours et on nous répond qu'il n'y en a pas», se rappelle Diarassouba. Son compagnon complète : «On restait toujours devant. On avait peur de se promener derrière. Il y a beaucoup de bâtiments militaires vides. C'est effrayant.»
Créés pour héberger les migrants après l’évacuation des camps qui s’étaient formés autours de Calais, Dunkerque et Paris, les CAO sont régis par une charte de fonctionnement. Celle-ci est éditée par le ministère de l’Intérieur et le ministère du Logement. Elle prévoit en premier lieu «d’assurer l’accueil et la prise en charge des personnes dans des conditions dignes et adaptées à leur situation et leur parcours».
D’après cette charte, le CAO doit aussi «permettre aux migrants de bénéficier d’un temps de répit, de reconsidérer leur projet migratoire, de bénéficier le plus rapidement possible de toutes les informations et de l’accompagnement administratif nécessaires au dépôt d’une demande d’asile s’ils souhaitent s’inscrire dans cette démarche».
L'isolement géographique transforme le centre en prison
Relégués en zones rurales, les résidents de Jaulges n'ont accès à rien. «Au camp il n'y a pas de réseau [internet] mobile. Il faut le chercher à des endroits précis», déplore Bakari. L'isolement géographique transforme le centre en prison. «On ne peut pas vraiment sortir. Il faut faire 12 km à pied», ajoute Diarassouba. Certains migrants disposent de vélos donnés par la Croix-Rouge, la plupart du temps il faut les acheter. Or, la majorité des réfugiés n'en ont pas les moyens.
«Le seul transport que la Croix-Rouge mettait à notre disposition, c'était un camion de 7 places pour aller chercher des cigarettes, des cartes téléphoniques et des boissons. Nous n'avions qu'une heure, et seulement le mardi, le jeudi et le samedi.» Ces voyages deviennent la seule occasion de quitter le centre pour les demandeurs d'asile. Il était pourtant prévu lors de la mise en place de ces structures que «les services de l’État veillent, dans toute la mesure du possible, à la proximité des services facilitant la prise en charge des personnes accueillies».
«Douze kilomètres à pied par jour, ça me fatiguerait un peu. Eux ça ne leur fait pas peur»
Joint au téléphone par BuzzFeed News, le directeur local du centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) de la Croix-Rouge (qui a bien voulu répondre à nos questions, mais a souhaité ne pas être nommé) concède : «Ils peuvent avoir le sentiment d'être coupés du monde. Pour être honnête, c'est évident que ceux qui viennent sont un peu surpris au début.» Mais il ajoute :
«Ils sont complètement dans la forêt. Cela dit, ils y trouvent aussi leur compte. C'est-à-dire qu'ils sont complètement libres, ils peuvent se promener tant et plus. Et c'est souvent des gens qui viennent de la campagne dans leur pays respectif. Je ne sais pas vous, mais douze kilomètres à pied par jour, ça me fatiguerait un peu. Eux, ça ne leur fait pas peur.»
Interrogé sur le temps qu’il faut pour parcourir la distance qui sépare le camp de la commune de Saint-Florentin, le directeur répond : «Ils mettent une bonne heure pour y aller. Parce que ce sont des gros marcheurs, hein…»
Les réfugiés que nous avons rencontrés ont le sentiment que les travailleurs sociaux leur enlèvent peu à peu la possibilité de participer à leurs propres démarches. «On avait reçu nos premiers récépissés [de titre de séjour] mais quand il a fallu les renouveler, nous n'avons pas pu y aller nous-mêmes», rapporte Bakari. «On ne pouvait pas envoyer de dossier ni sortir faire des démarches.» Le directeur du CHRS tente de le justifier par la difficulté des migrants à se déplacer : «On les accompagne parce qu'ils ne peuvent pas le faire tout seul. On accompagne à Dijon ceux qui ne savent pas se débrouiller. Certains sont incapables de prendre le train seul donc on les emmène.»
Des conditions de vie proches de la détention
Diarassouba décrit le camp comme une véritable prison : «Le camp est très vaste. La cour est fermée et clôturée par des murs en béton et des barbelés. Il n'y a qu'une entrée et elle est souvent fermée. On pouvait aller et venir par la porte piéton.» Il insiste aussi sur la surveillance dont les migrants font l'objet. «À Jaulges, on est surveillé. Il y a des caméras devant. On ne sait pas si elles fonctionnent. Les travailleurs sociaux passent dans les chambres chaque matin à 8 heures pour voir si tout le monde est bien dans son lit», précise Dirassouba. Interrogé sur la présence de caméras, le cadre de la Croix-Rouge laisse échapper un rire sarcastique : «Arrêtez de croire tout ce qu'on vous dit il n'y a pas de caméra.»
Des caméras surplombent pourtant bien le portail du camp de Jaulges, comme nous l'avons constaté en prenant des photos. «C’est interdit de prendre des photos ici. C’est une propriété de l’État. Vous devrez les supprimer avant de sortir», nous a plus tard intimé un employé de la Croix-Rouge. Ce même employé tentera tout au long de la visite de restreindre nos mouvements. «Vous ne pouvez vous déplacer que dehors et dans la pièce de vie. Vous ne pouvez pas vous rendre dans les autres pièces ni à l’arrière du camp.»
Les murs d’enceinte du camp sont surmontés de barbelés. Contrairement à ce que prétend le cadre de la Croix-Rouge, des caméras – dont on ne sait pas si elles fonctionnent – surplombent l’entrée du camp.
Le CAO est ouvert, les migrants peuvent aller et venir à leur guise. Mais la disposition du camp, avec ses hauts murs d’enceinte et les dispositifs de sécurité laissés par l’armée, créent rapidement l’impression de se trouver dans un lieu clos. L’épaisse forêt qui entoure le site amplifie ce sentiment d’enfermement. Un résident actuel du camp décrit : «Notre seul intermédiaire avec le monde extérieur, c'est le bureau du camp. Rien n'entre ou ne sort sans passer par le bureau. Tout passe par là.» Il n’est en effet pas possible d’emprunter l’unique entrée du camp sans être vu des bureaux de la Croix-Rouge, situés près du portail.
Diarassouba témoigne de cet isolement et d'un sentiment puissant d'entre-soi qui sont entretenus par le personnel du centre. Selon lui, les contacts avec l'extérieur étaient rares et l'administration employait son énergie à les limiter au maximum. «Les travailleurs sociaux n'acceptent pas vraiment que l'on vienne nous voir. Surtout si [les visiteurs] sont des Blancs.» Selon Diarassouba, les employés du camp n’hésiteraient pas à faire pression sur les résidents. «Ils viennent nous voir pour nous dire que nous ne pouvons pas les rencontrer, ils nous intimident. Ou alors ils réduisent les entrevues. Ils ne veulent pas que l'on nous donne d'informations sur nos droits», explique-t-il.
«Le problème de ce camp, c'est que personne ne veut nous donner d'information, confirme un résident. Nous n'avons rencontré aucune association et personne ici ne nous dit où et comment nous pouvons trouver et connaître nos droits.»
Ouverture du courrier et interdiction d'accès aux associations
On s'est rendu au camp de Jaulges — sans se présenter en tant que journaliste. Alors que l'on visitait l'endroit, le personnel du CAO nous a soumis à un véritable interrogatoire.
«Je me pose des questions sur votre venue ici. Je me demande si vous connaissez vraiment ces personnes. J’ai des doutes vous voyez, alors je m’interroge. J’aimerais connaitre les raisons de votre venue ici. Je pense que vous ne les dites pas», a questionné l'un d'entre eux. On a alors répondu que nous venions rendre visite à l'un des réfugiés.
La Croix-Rouge est la seule organisation présente sur place. Elle interdit l'accès de ce camp à d'autres associations d'aide aux réfugiés. Et quand on interroge au téléphone le directeur du CHRS sur ce point, il s'exclame : «Ils peuvent aller les voir à côté [dans la forêt], mais elles ne rentrent pas dans le CAO. C'est une propriété privée ! Vous ne faites pas rentrer tous les gens qui le veulent chez vous ! Là c'est exactement la même chose.» Puis ajoute : «C'est une propriété dont la Croix-Rouge est responsable. Elle fait rentrer les gens qu'elle connaît et dont elle sait ce qu'ils vont faire. On est là pour les aider [les réfugiés]. Une association d'aide aux migrants, on en est une.»
Parmi les problèmes au sein du CAO, la question de la correspondance est un sujet épineux. Certains migrants parlent de l’ouverture imposée de leur courriers, qu’ils vivent comme une surveillance. «Là-bas on doit retirer nos courriers auprès de la Croix-Rouge. Quand on y va, ils les ouvrent devant nous et ils les regardent d'abord», relate Bakari. Les réfugiés rencontrés au centre confirment ces méthodes. Du côté de la direction, on reconnaît ces pratiques : «Les courriers officiels, on les ouvre devant eux pour leur montrer ce dont il s'agit. Sinon, comme ils ne savent pas lire le français ils passeront au travers de l'information.» De son côté Diarassouba, qui est francophone, dit effectivement ne pas avoir eu à subir ces intrusions dans sa correspondance : «Ils me laissaient prendre mon courrier et l'ouvrir dans ma chambre. Ils se méfiaient de moi, car je parle et je lis bien le français.»
Des conditions sanitaires inquiétantes
Dans le camp de Jaulges, ce sont les migrants qui sont chargés de garder l'endroit propre. «C'est nous qui avons dû le nettoyer et garder l'endroit sain. Il y a un infirmier qui venait le lundi et le jeudi. Il fallait lui demander un rendez-vous à l'hôpital si on était malade. Nous avons tous été malades», se remémore Bakari.
«Des gens avaient la tuberculose», affirme Diarassouba. «L'un de mes amis l'avait, mais je ne l'ai su qu'après avoir quitté Jaulges. On faisait tout ensemble. On fumait la même cigarette, on buvait les mêmes boissons et on mangeait dans le même bol. Il allait souvent à l'hôpital et les travailleurs sociaux n'ont pas su dire ce qu'il avait. Maintenant, j'ai aussi la tuberculose», se plaint-il. Il sort de son classeur les résultats d'analyses effectuées six jours après son départ de Jaulges, qui attestent d’une contamination par le virus.
La conduite à tenir en cas de manifestation chez un patient de la tuberculose est très précise. Interrogé par BuzzFeed News, Florian Vivrel, médecin de la mission française de Médecins sans frontières explique :
«Dans un monde idéal, si ces personnes ne sont pas hospitalisées, c'est qu'en théorie elles ne sont pas contagieuses. Si la personne est symptomatique, on l'hospitalise et on lui met un masque. Tant qu'on est pas certain que ce n'est pas ça, les patients sont gardés en isolement. Quand on a quelqu'un qui est positif et contagieux, il faut faire une enquête dans l'entourage.»
À l'intérieur du camp, plusieurs réfugiés se souviennent de cas de tuberculose. «Il y a eu sept cas dans le camp. Aujourd'hui, il y a encore trois tuberculeux dans le camp. Nous vivons tous mélangés, personne n'a été séparé ou éloigné des autres», précise l'un d'entre eux. Après la première apparition de la maladie, ils confirment la venue de médecins pour dépister le virus chez les autres résidents. Les médecins auraient ensuite donné un traitement médicamenteux aux malades, sans les isoler du camp.
Joint par téléphone, l’agence régionale de santé de Bourgogne (ARS) confirme avoir enregistré un cas de tuberculose à Jaulges au cours des trois derniers mois. Celui-ci aurait été pris en charge par le Centre de lutte antituberculeuse. «À ce jour, il n’y a pas de cas de tuberculose maladie [contagieuse] au CAO de Jaulges», affirme l'ARS. Quant au traitement contre la tuberculose prescrit à certains résidents de Jaulges, il pourrait s’agir de «traitement préventifs et non curatifs». Il serait alors question de cas de «tuberculose latente» et non contagieuse. «C'est pour ça que nous, on a aucun cas de signalés. Parce qu'on s'occupe de ceux qui sont contagieux. Il y a zéro nouveau cas de notre côté. Si on a pas de cas signalés, on ne peut pas communiquer.»
«La promiscuité favorise la contagion», précise Florian Vivrel sur la propagation de la maladie. «L'insalubrité, la fatigue et l'épuisement sont des facteurs qui vont aussi, à l'échelle d'une population, favoriser la contagiosité», ajoute-t-il. Au camp de Jaulges, les locaux sont vétustes et les résidents sont 4 à 6 par chambre malgré la charte qui préconise «l’individualisation de l’espace, autant que possible et en fonction de la configuration du lieu, afin d’assurer un accueil dans la dignité des personnes».
«Ce sont des gens qui ont souffert et qui font beaucoup de "bobologie"»
Du côté de la Croix-Rouge, c'est une version tout à fait différente que le directeur du CHRS livre : «On a pu avoir des maladies graves. Ça a été détecté et tout le monde a été traité aussitôt. Actuellement on n'a plus rien. Il peut y avoir des rhumes, il y aura certainement des grippes. Personne n'est reparti malade du camp.» Pour lui, les migrants exagèrent leurs problèmes. «Ce sont des gens qui ont beaucoup souffert et qui font beaucoup de "bobologie", je dirais… Ils ont souffert comme des malades en traversant le Sahara. Maintenant lorsqu'ils se frottent le petit doigt par terre ils souffrent. Et comme ils savent qu'il y a des soins ils viennent les chercher aussitôt», déclare le directeur du CHRS.
Une antichambre pour les expulsions
À Jaulges, la durée de séjour des demandeurs d'asile à tendance à s'éterniser. Un migrant résume : « Notre vie ici, c'est Prison Break. Beaucoup de gens transférés de Paris quittent immédiatement le camp. Personne ne veut rester ici, dans la forêt, donc beaucoup décident de fuir. Ils choisissent de dormir dans la rue à Paris plutôt qu'à Jaulges.»
Diarassouba et Bakari ont donc passé huit mois au camp avant d'être à nouveau déplacés. Ils ont été conduits à environ trente kilomètre de Jaulges, dans une autre structure située dans la ville d'Appoigny, pour être expulsés le plus rapidement possible vers l'Espagne. «Une fois là-bas, on est assignés à résidence 45 jours en attendant l'expulsion», explique Diarassouba.
«Dans les deux premières semaines on nous donne un premier billet [d'avion]. Si on l'a refusé, on est considéré comme étant en fuite.»
Sous le coup d’un arrêté d’expulsion, Diarassouba et Bakari ont refusé de prendre le billet d'avion et ont choisi de s'enfuir pour un futur incertain. «Aujourd'hui, c'est l'enfer que je vis. Ma vie est basée sur le doute», raconte Diarassouba, qui est très amer : «Si je n'étais pas en danger, je ne serais pas parti [de Côte d’Ivoire]. Ce que je regrette plus que tout, c'est de ne pas avoir été écouté en France. Je parle la langue de ce pays mais on ne m'a même pas donné l'occasion de m'exprimer. Maintenant je n'ai aucune idée de ce qui va arriver. Je ne sais même pas si tout ça finira par s’arrêter.»
Contacté par BuzzFeed News, le Défenseur des droits déclare avoir été saisi sur les conditions de vie au CAO de Jaulges.
Ce qui se passe en Libye est au-delà de l'enfer que tous ces réfugiés subissent encore et encore.
De plus les pays d'Europe sont complices dans la mesure où ils payent la Libye pour retenir les réfugiés.
J'ai également écouté François Gemenne sur France Bleue cette semaine qui relate ce fait monstrueux de la Libye, le nommant le camp de concentration à ciel ouvert.
Je me pose la question sans cesse.
Pourquoi de telles cruautés sont permises sous couvert de l'Europe ?
Que se passe-t-il vraiment ?
Je n'ai pas de mots.
Je me sens tellement impuissante face à de telles atrocités.
Comment faire cesser de tels agissements.
J'avoue que j'ai de plus en plus de mal à vivre normalement chaque jour avec ce qui se passe en Libye en sachant que la France est complice.
Désolée pour mon message qui pourrait sembler un peu confus ou autre.
Mais je n'ai pas de mots qui puissent calmer tant de maux.
Je n'ose même pas dire bonne soirée sans que cela puisse être indécent face à ce qui se passe.
"STOP À L'ESCLAVAGISME EN LIBYE " RASSEMBLEMENT AUTORISÉ PAR LA PRÉFECTURE, LE VENDREDI 24 NOVEMBRE DE 16H À à 19H , DEVANT L'AMBASSADE DE LIBYE 6-8 RUE CHASSELOUP-LAUBAT MÉTRO CAMBRONNE LIGNE 6... SOYONS NOMBREUX ET NOMBREUSES POUR DIRE STOP !!!!
(Je ne peux pas mettre les photos et vidéos, elles sont au sens propre insoutenables).
Il y a cinq Prahda en Île de France pour un total de 586 détenus. Adoma les gère : c'est un expert en détention depuis la création des foyer de travailleur migrants, car Adoma est Sonacotra.
Comment vivre de la misère des autres.
Melun: 133 personnes, Neuilly sur Marne: 106 personnes, Maurepas: 110 personnes, Conflans Ste Honorine: 136 personnes et Achères: 101 personnes.
Voilà pour les centres de déportations en région Île de France ..
Et ce n'est que pour l'Île de France et que pour les Prahda. Car Adoma est une grande entreprise française soutenu par l’État :
Une société française ... détenu par des acteurs publics (État, SNI…)
Adoma, naguère Société nationale de construction de logements pour les travailleurs (SONACOTRA), anciennement Société nationale de construction de logements pour les travailleurs algériens (SONACOTRAL), est une société d'économie mixte française dont le capital est détenu par des acteurs publics (État, SNI…) chargée de construire et gérer un grand nombre d'habitats à vocation sociale (foyers de travailleurs migrants, résidences sociales, pensions de famille, centres d'hébergement, centres d'accueil de demandeurs d'asile, aires d'accueil de gens du voyage, etc.), au total plus de 71 000 places de logement en France. Le 23 janvier 2007, la Sonacotra change de nom et devient « Adoma » (nom construit à partir du latin « ad » qui signifie vers et « domus », la maison).