Visites hebdomadaires et c'est toujours l'atroce routine du CAO d'Auxerre déstabilisante et qui ancre toujours plus le désespoir de l'impuissance.
Les demandeurs d'asile raflés à Paris sont arrivés, remplaçant les derniers expulsés, partis en fuite ou transférés vers le Prahda. Leur récépissé en témoigne, ils ont été enregistrés il y a quelques jours à peine en région parisienne et ils sont déjà là, sur la voie express de l'expulsion.
Et leur histoire, dramatique, s'égraine dans leurs mots : cette fois, ce sont des Afghans, ils sont Dublin de tous les pays, Belgique, Grèce, Suède. Ils sont tous déboutés comme les dizaines de milliers de demandeurs dans toute l'Europe qui fuient un pays qui veut les expulser, et tentent dans un autre pays l'impossible demande. Pas le cœur de leur expliquer dès les premiers moments, ce qui se passe ici. Même si, certainement, les autres demandeurs ont pu le leur dire. Il reste toujours en eux un espoir.
Après une mini-pause due aux vacances, les notifications ont repris. Croisés devant le CAO, deux demandeurs vont chercher une lettre recommandée, ils le savent, c'est la notification exécution Dublin. Ils sont soudanais, dans les à peine deux mois qu'ils ont passés au CAO, les liens s'étaient tissés. Réservés et dignes, ils sont là à chaque visite et échangent en un français hésitant, déjà remarquable pour un si court séjour. A leur retour, ils tendent une lettre, notifications dans la deuxième quinzaine de mai.
5 demandeurs d'asile ont rejoint le Prahda d'Appoigny. Leur rendre visite alors pour ne pas entériner la volonté d'isolement, suivre jusqu'au bout la politique qu'on leur inflige. Le Prahda laisse lors des visites obligatoirement tardives une impression glauque et tellement destroy.
Et il y a ceux qui n'ont d'autres alternatives dans les jours qui viennent que l'avion ou la rue. Dans cet absurde et désespérant ballet des déboutés de toute l'Europe.
Nous ne pouvons certainement pas empêcher cette inhumaine politique, seul un changement de société le pourrait. Tant ce traitement de l'asile comme la colonisation autrefois et aujourd'hui font partie inhérente de cette société d'exploitation et d'oppression. Mais nous pouvons sans relâche la combattre et faire connaître ce qui se passe ici, sous nos fenêtres, à la préfecture de l'Yonne.